Intervenant après le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem en 2018, le plan de paix proposé par l’administration des États-Unis pour résoudre la question de Palestine et pompeusement « deal du siècle » s’inscrit dans la ligne traditionnellement pro-israélienne de Washington qui en l’espèce ne peut prétendre être un honnête courtier puisque les diverses administrations américaines sont depuis des décennies aveuglément pro-israéliennes.
La politique de gribouille des États-Unis
Après que l’on est sottement glosé à qui mieux mieux sur les prétendus « printemps arabes » qui ont généralement apporté le chaos dans les pays où ils ont eu lieu, il faudrait sans doute réfléchir aux conditions de l’éclosion d’un véritable printemps arabe qui passera par la paix en Palestine. Il ne s’agit évidemment pas dans cette affaire d’être plus palestiniens que les Palestiniens, qui d’ailleurs rejettent tous le plan américain, mais simplement de rappeler les constantes du droit international en la matière, à savoir c’est-à-dire qu’un règlement de paix passe par la libération de tous les territoires occupés en 1967 sur le fondement des résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité des Nations Unies, la création de deux États souverains viables et Jérusalem-Est comme capitale de l’État palestinien. Voici les seules bases d’une paix juste et durable qui permettrait de mettre un terme à ce conflit ancien. Le crime des États-Unis depuis des lustres est de soutenir aveuglément la partie israélienne contre la partie arabe et de s’opposer systématiquement à faire avancer a cause de la paix dans le respect du droit international reconnu par une immense majorité de la communauté des nations.
Bien sûr on ne peut que regretter que le président Trump s’obstine à faire la danse du ventre pour complaire à un Netanyahu qui n’est rien d’autre qu’un dirigeant corrompu et, par surcroît, fasciste. On doit surtout déplorer le fait que la politique américaine dans la région du Proche-Orient est digne de gribouille. C’est une dangereuse politique qui multiplie les faux pas, de la funeste invasion de l’Irak en 2003, laquelle a précipité le chaos régional, au fameux « deal su siècle », en passant par le funeste renversement des alliances imaginé par Obama au profit de l’Iran ou les prétendus « printemps arabes » qui ont accentué le désordre régional. Ce n’est donc par Trump qui est responsable de cette situation mais tout un ensemble de dirigeants – démocrates ou républicains – qui se trompent depuis trop longtemps. Mais, même s’il met fin à une vieille hypocrisie des États-Unis, le « deal du siècle » n’est qu’une imposture qui ne peut que conduire à une débâcle tant il est vrai, comme le note le professeur états-uniens Alon Ben Meir, que le résultat est de de condamner le conflit israélo-arabe à l’intensification d’une haine dont les deux peuples pâtiront.
La matrice des frustrations
Il ne faut pas sous-estimer la puissance émotionnelle de la question de Palestine qui dure depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle demeure un aspect fondamental de la paix au Proche-Orient. L’absence de règlement de cette affaire nourrit la radicalisation car le terreau du radicalisme n’est pas la religion mais les crises régionales non résolues. À cet égard, le drame de la Palestine reste la matrice de toutes les frustrations et des colères du peuple arabe et des musulmans du monde entier qui sont profondément humiliés de constater que la communauté internationale se montre incapable de faire respecter le droit.
Pourtant, comme le disait le président Yasser Arafat, les Palestiniens ne demandent pas la lune, ils souhaitent simplement que soit reconnu leur droit à créer un État indépendant. Si nous ne voulons pas que la société internationale soit livrée à la loi du plus fort, sans aucune règle et en bafouant toutes les normes juridiques, il faut trouver une solution juste à la question palestinienne. Le seul moyen de parvenir à une paix durable est un compromis avec deux États, Israël et la Palestine, vivant côte-à-côte en paix et en sécurité. La base de cette paix reste l’Initiative arabe de paix de 2002 et, de fait, le plan de paix arabe est la seule proposition crédible et sérieuse qui soit actuellement sur la table des négociations.
La voix de la France
Certains estiment que la perspective de cette paix juste s’éloigne. Ce n’est pas une raison pour baisser les bras. Sur ce point on doit regretter le silence de la communauté internationale, en particulier de la France livrée à un régime dont l’amateurisme est navrant. On sait que la France a fort toujours privilégié une solution passant par une conférence internationale car il est clair que les prétendues négociations bilatérales sont un leurre. En effet comment peut-on négocier entre un colosse et un nain ? La force prime le droit. Et celui qui a la force, Israël, ne veut manifestement pas de la paix. D’autant que le soi-disant parrain américain ne s’est jamais comporté en arbitre impartial. C’est pourquoi la France a longtemps su faire entendre sa voix qui est celle du bon sens, soutenant l’idée d’une conférence internationale destinée à trouver une solution. C’est le seul moyen d’avancer dans l’intérêt de toutes les parties, y compris de l’État d’Israël qui ne peut éternellement camper sur la position de ses dirigeants extrémistes.
Il est consternant que Paris est désormais inaudible et ne tient plus son rôle visant à parler aux peuples un autre langage que celui du renoncement et de la soumission. Et que l’on ne vienne surtout pas prétendre que la France n’est plus une très grande puissance en mesure d’influencer le cours des choses. Ce genre de ritournelle a toujours justifié les plus lamentables renoncements. Le cher Michel Jobert nous répétait que ce n’est pas la force qui compte mais bien la volonté. D’ailleurs, on voit bien quelle peut être la puissance morale d’un pays de moyenne dimension comme le Maroc dont la parole claire et franche compte beaucoup auprès des peuples, notamment très récemment sur l’affaire de Palestine qui est la cause du Roi et du peuple unis.